Observez attentivement l'affiche ci-dessus.
Un homme et une femme portant l'un la barbe, l'autre le foulard, se donnent à voir comme musulmans.
Ils encadrent, la tête fièrement levée, un homme noir, et tous les trois apparaissent sur fond des couleurs nationales. A première vue, rien que de tout à fait acceptable et correct.
Regardons-y de plus près, cependant. Que voyons-nous et, chose peut-être encore plus importante, que ne voyons-nous pas ?
- On voit deux hommes et une seule femme, voilée, placée derrière eux. Ce trio savamment choisi est-il censé représenter, entre autres, une norme, dans laquelle l'homme serait naturellement devant, plus âgé, et barbu, la femme derrière, et voilée ? Où est passée la femme noire ?
- L'allure martiale des 3 personnages et le drapeau, à l'arrière plan, flottant au vent n'est pas sans rappeler les affiches d'époques troublées et l'appel à la mobilisation nationale. Remarquons d'ailleurs que les personnages tournent le dos au drapeau et regardent de l'autre côté, vers une "Nation" qui semble resplendir dans le ciel...
- Le slogan, colorié aux trois couleurs, est rédigé en verlan. Celui-ci est censé représenter le langage des quartiers en difficulté et la jeunesse ce qui, compte tenu de la remarque précédente, accrédite ce langage comme celui de la France combattante.
- Le titre, au dessus, est un rappel détourné du slogan " Touche pas à mon pote", qui avait fait florès du temps que Harlem Désir menait ce mouvement. Je dis "détourné" parce que, en son temps, ce slogan traduisait au contraire l'aspiration à une société décloisonnée, débarrassée du communautarisme et de ses poisons. Que peut bien signifier le verbe "touche", à l'impératif ? Il inquiète.
- Le mot "Nation", curieusement employé ici, trouble l'esprit. De quoi s'agit-il, en effet ? Ordinairement, ce mot désigne le pays et son peuple. Il s'agirait donc de la Nation Française. Mais alors, pourquoi la réduire à deux de ses composantes minoritaires ? Est-ce à dire que celles-ci se la seraient appropriée, et qu'elle serait réduite à eux ?
- Les "Rebeus", c'est à dire les Beurs, c'est à dire les Arabes, sont nommés par un mot certes détourné (deux fois), mais qui n'en désigne pas moins un peuple, et non une religion. Pourquoi, alors, représenter l'homme et la femme " Rebeus", comme évidemment et nécessairement musulmans pratiquants et intégristes ? Cette équation : origine = peuple = confession est inacceptable dans une République laïque. Que dirait-on si, pour représenter les Français "souchiens", comme les appelle la présidente du mouvement auteur de cette détestable affiche (*), on les montrait portant les signes ostensibles de la religion dominante en France ? Qui peut s'arroger le droit, en 2010, en France, de réduire un peuple à une religion, fût-elle majoritaire ?
- Les "Renois", naguère appelés "Blacks", les Noirs, donc, sont entraînés malgré eux dans cette vision communautariste de la société. Qu'en pensent nos compatriotes d'Outre-Mer, notamment ? Sont-ils satisfaits de cette assimiliation ? Se sentent-ils représentés par ce terme de "Renois" ?
- Enfin, last but not least, le sous-titre : " Campagne Nationale contre l'Islamophobie et la Xénophobie", met le comble à la confusion dont je viens de parler, en réduisant les humains à leur couleur de peau ou à leur religion, et en attisant, sous couvert de la dénoncer, la méfiance à l'égard du communautarisme, religieux notamment.
(*) Il s'agit de Madame Houria BOUTELDJA, employée à l'Institut du Monde Arabe, à Paris, présidente de l'association " les Indigènes de la République" ( dont je vous invite à visiter le blog pour vous construire une opinion éclairée ) qui vient d'être mise en examen, ce qui constitue une première en France, pour " injure raciale à l'égard des Français". Cette mise en examen, si elle débouchait sur un procès devant le tribunal correctionnel, pourrait bien faire jurisprudence.
Madame BOUTELDJA est accusée d'avoir désigné la majorité des Français par le terme de "souchiens" ( censé vouloir dire " de souche" ), qui sonne à l'oreille comme "sous-chiens".
A ce propos, il y aurait une intéressante étude à mener sur les dérives apparemment anodines du vocabulaire, qui, à coup d'injures détournées, de verlan, d'abréviations, d'initiales remplaçant les mots, accoutument les citoyens à l'inacceptable ( cf NTM, Rebeus, Feujs, Ni putes...)
Commentaires
j'irai voir pour me faire mon opinion
En effet, c'est un beau texte contre l'intégrisme. Mais peut-on y ajouter foi ?
Il y a 250 ans Voltaire avait déja stigmatisé le fanatisme, et permettez moi de le croire plus crédible dans cette matière.
Pour moi la religion est en tant que telle porteuse d'intolérance et de violence parce qu'elle détient une vérité révélée, indiscutable à ses yeux. Cette certitude est le fondement de toute violence.
" Tantum religio potuit suadere malorum " " La religion a suscité tant de malheurs ". Lucrèce ( 50 av. JC ).
Toutes les déclarations la main sur le coeur ne changeront jamais, hélas, cette effroyable réalité.
C'est la raison pour laquelle la laïcité, c'est à dire la relégation du religieux au domaine exclusivement privé est une urgence absolue, et qu'aucune tolérance ne doit assouplir cette exigence.
C'est ce que mon article s'efforce de dire.
ce texte très intéressant n'a pas assez été lu :
ROME, Mardi 9 novembre 2010
(ZENIT.org) -
Le Patriarcat Grec Melkite Catholique d’Antioche et de tout l’Orient d’Alexandrie et de Jérusalem a publié une déclaration de S.B. Gregorios III au lendemain du « carnage » survenu dimanche en la cathédrale de Notre Dame de la Délivrande de Bagdad.
Une semaine après le massacre en la cathédrale de Notre Dame du Perpétuel secours.
Déclaration de S. B Gregorios III Bain de sang chrétien dans la cathédrale de Notre Dame de la Délivrance à Bagdad :
"Le carnage qui a eu lieu dimanche 31 octobre 2010 dans la Cathédrale Notre Dame de la Délivrance des Syriens Catholiques à Baghdad est d’une cruauté et d’une barbarie inouïe. C’est un attentat pour saper la bonne volonté des vrais constructeurs de ponts entre les cultures ; les courageux héros du dialogue interreligieux ; ainsi que l’optimisme du Synode pour le Moyen Orient.
Je présente des sincères condoléances et l’assurance de ma prière et celle de mon église à Sa Béatitude le patriarche Ignace-Joseph III Younan, à Son Eminence le cardinal Emmanuel III Delly et à tous ceux dont le cœur a été blessé par ce crime.
Nous savons que cet acte criminel n’est pas le fait de l’islam authentique, et ne peut être fondé sur lui. Malgré cela, nous considérons que les musulmans en Irak et dans tous les pays arabes sont les seuls responsables de la sécurité des chrétiens, puisqu’ils détiennent le pouvoir, l’armée et les forces de l’ordre.
Nous sollicitons les pays arabes afin qu’ils étudient la réalité du terrorisme du fondamentalisme et des courants qui s’en inspirent. C’est une responsabilité islamique globale, parce que présenter l’Islam sous cette forme est une défiguration de l’Islam authentique. Les vrais ennemis de l’Islam et des musulmans ne sont ni « l’Islamophobie » ni « l’Europe chrétienne » mais plutôt ces organisations et courants intégristes.
Elles sont aussi l’ennemi du christianisme et de toute valeur chrétienne et musulmane, sociale et humaine, arabe et non-arabe.
Les chrétiens sont pacifiques, patriotes, loyaux, fidèles à leur patrie et à leur pays, tolérants et naturellement portés au pardon. Mais ils ne sont pas passifs, lâches, peureux, tout comme ils ne sont pas voués aux vexations. Ils ne sont pas des moutons destinés à être égorgés par les intégristes. Les chrétiens sont les bâtisseurs des valeurs, des nations et des cultures, dont la culture islamique elle-même.
Si les musulmans ne font rien pour sauvegarder cette souche créatrice que sont les chrétiens arabes en Irak et dans tout le Moyen Orient, la prospérité et l’élan de la culture musulmane seront en danger d’effondrement, et les musulmans seront alors leurs propres ennemis, ennemis de leur foi et de leurs pays.
Chers frères arabes, musulmans et chrétiens adoptons un discours unificateur et agissons ensemble pour bâtir un meilleur avenir pour nous, nos enfants et nos compatriotes."
Gregorios III
Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient d’Alexandrie et de Jérusalem
Raboueh, le 8 novembre 2010
Source : Zenit, 9 novembre 2010