A quelques kilomètres du lieu où j'habite se trouve un bourg tranquille. Il n'a ni charme ni intérêt remarquable, et son nom serait inconnu s'il n'était associé à celui d'une grande gare de triage, Laroche-Migennes, qui résonna si souvent aux oreilles des voyageurs d'antan.
Or voici qu'il est rattrappé par la mondialisation du crime et du fanatisme religieux.
L' imam de la mosquée de Migennes dans l'Yonne, émir du Mouvement de la jeunesse islamiste marocaine (MJIM), est soupçonné d'avoir commandité des braquages dans la région parisienne pour financer le djihad au Maroc à l'été 1994. Il a été mis en examen jeudi 30 septembre 2010 et écroué à Paris, à la prison de la santé.
Abdelilah Ziyad, 52 ans, a été mis en examen pour "complicité et recel de vols avec arme en bande organisée, le tout en relation avec une entreprise terroriste". Il est soupçonné par le juge antiterroriste Marc Trévidic d'avoir ordonné à des membres de ce réseau, recrutés en banlieue parisienne et dans la région d'Orléans, de commettre des braquages à Paris et région parisienne.
Adbelilah Ziyad, alias "Rachid", a déjà été condamné en janvier 1997 par le tribunal correctionnel de Paris à huit ans de prison, pour une campagne terroriste au Maroc à l'été 1994.
Un attentat à l'hôtel Atlas-Asni, à Marrakech, avait entraîné la mort de deux touristes espagnols en août 1994. Le groupe serait aussi impliqué dans le du mitraillage du mur d'un cimetière juif de Casablanca. Plusieurs de ses membres ont été condamnés à mort au Maroc.
Libéré en 2001 et interdit de territoire pendant 10 ans, Adbelilah Ziyad est considéré comme l'émir du réseau. Il était resté en France, dans l'Yonne, sous une fausse identité, tandis que l'instruction sur le volet des braquages se poursuivait.
« De 1999 à 2007, il n'y a eu aucun acte dans ce dossier. C'est absolument ridicule de venir le chercher maintenant », s'est insurgé son avocat Me Vincent Courcelles-Labrousse. « Il était incarcéré jusqu'en 2001. Jean-Louis Bruguière (magistrat alors chargé du dossier, ndlr) avait toutes les possibilités de l'interroger, de le mettre en examen, il n'a rien fait », a-t-il ajouté.
"Ridicule" ?Ce que dit cet avocat revient à ceci :
" mon client a réussi à se planquer et à se faire oublier durant 8 ans; fichez lui donc la paix avec ces histoires de braquage à main armée, de campagne terroriste au Maroc, de mort de touristes et de profanation de cimetière ! "
Un avocat, bien entendu, doit tout mettre en oeuvre pour défendre au mieux son client et pour atténuer autant que possible sa responsabilité, à défaut de pouvoir établir son innocence.
Mais l'éthique et la retenue doivent le guider. Il n'est pas acceptable de minimiser à ce point des crimes qui, s'ils sont confirmés, valent à leur(s) auteur(s) la perpétuité en France et la mort au Maroc.