Comme je le disais il y a 15 jours, je considère très sérieuse la probabilité d'une victoire de Madame Le Pen en 2012, surtout si elle venait à affronter au second tour un candidat de gauche.
La seule réserve que je ferais après la publication de ces chiffres qui la placent en tête des intentions de vote des électeurs, est que le sondage lui-même est susceptible de modifier ces intentions par un double effet de panique dans les états majors et de désintégration des "petites" candidatures.
C'est d'ailleurs le côté contestable de ces enquêtes d'opinion dont la fiabilité est plus que douteuse, mais dont l'effet sur le comportement des électeurs n'a finalement jamais été mesuré quand, de prédictif, il devient prescriptif.
J'aimerais lire un sondage qui me dise les suffrages que le sondage a déplacés !
En 2002, à la Martinique, les électeurs avaient été prévenus grâce au décalage horaire de 5 heures, des résultats de l'élection présidentielle : élimination de Jospin par Le Pen.
L'effet fut immédiat : les électeurs potentiellement abstentionnistes se ruèrent dans les bureaux de vote et se détournèrent des candidatures de diversion pour tenter de faire mentir ce "sondage" en vraie grandeur... mais trop tard et sans efficacité réelle vu la proportion faible que représente le corps électoral antillais par rapport à l'ensemble.
Cet épisode prouve bien que lorsqu'il est prévenu du résultat final probable, l'électeur modifie son suffrage.
Toujours est-il, pour en revenir au résultat alarmant de ce sondage d'hier, qu'on est en train d'assister à la conséquence inévitable de tous les épisodes calamiteux qui ont peu à peu ruiné la crédibilité des hommes et des femmes politiques dans notre pays.
Lâchage de Ségolène Royal par ses "amis" du Parti Socialiste, Fabius et Strauss-Kahn en tête, en 2007, magouilles de l'élection de la première secrétaire du PS en 2010, désastreux épisode de Georges Frêche la même année, catastrophique situation de la fédération des Bouches du Rhône dénoncée par Arnaud Montebourg, imbroglio à la fois ridicule et scandaleux de MAM en Tunisie, affaire Woerth-Bettencourt, affaire Clearstream et faux rabibochage de Villepin et du Président, procès de Chirac pour détournement d'emplois publics, remaniements ministériels intempestifs, anciens ministres qui, tout justes sortis du Gouvernement publient articles et livres pour étriller leurs anciens collègues, etc, etc.
Les gens au pouvoir croient que le temps efface tout, que le peuple est amnésique, qu'une affaire en fera oublier une autre. C'est faux en général et ce l'est encore plus en particulier depuis internet qui n'oublie rien, qui ne pardonne rien.
Comme un feu qu'on a du mal à faire partir mais qui, plus il monte, plus il finit par brûler même des matériaux qui l'auraient étouffé au départ, chaque jour qui passe, chaque évènement qui semble corroborer cette impression générale de déclin, de décadence, est une chance de plus pour elle de se rapprocher de la victoire, jusqu'à des évènements tout à fait imprévus en train de survenir au sud de la Méditerranée, qui viennent accélérer le processus en rendant réel et palpable le risque de déferlement d'une insupportable vague d'immigration.
Le pays mal gouverné, la crise mondiale qui ruine l'effet des politique publiques, qui pèse sur le coût de la vie, qui accroît le chômage, l'opposition en plein désarroi, tout favorise Madame Le Pen.