Je suis arrivé dans le village il y a 31 ans.
J'y ai connu des jours heureux, très heureux même.
Je m'y suis engagé pour la première fois dans la vie locale, associative et élective en 1982.
J'y ai voté pour la première fois de ma vie à 36 ans.
J'y ai vu la mesquinerie de la droite et celle de la gauche.
Je suis parti, revenu, reparti, revenu.
J'y ai travaillé durant 25 ans avec bonheur.
Je m'apprête à le quitter sans regrets après 31 ans et demi.
Je ne suis plus inscrit sur ses listes électorales.
Je ne porte aucun regard à ce qui s'y passe
( il ne s'y passe d'ailleurs absolument rien).
J'ai mille autres centres d'intérêt.
C'est de ceux-ci que je parle ici.
Je demande qu'on cesse de m'entretenir du village.
Si on insiste, je ne laisserai plus passer .
Ah mais !
Commentaires
En effet , cher Hervé, je ne souhaite plus qu'on me demande mon avis à propos de la vie du village, qu'on m'entretienne des rebondissements - ou pour être plus exact - de la lente agonie du village, des gens du village, des "autorités" du village, etc, comme s'y je devais y prendre un intérêt quelconque sous prétexte que j'ai perdu des années et une somme folle d'énergie à essayer de lui être utile.
C'est, aux yeux de certains esprits étroits comme le village, une sorte de devoir que j'aurais contracté, un peu comme si vous obligiez quelqu'un qui vous a rendu service un jour à s' occuper de vous tout le reste de sa vie, ou que vous en vouliez à quelqu'un qui vous donné de l'argent de ne pas vous en donner encore !
Pour ne pas avoir à remercier des bienfaits passés, ce genre de personnes vous reproche de ne pas les poursuivre ad vitam aeternam.
Mais cette recommandation n'est évidemment pas pour vous, Hervé, qui ne parlez du village que pour le dépasser et dire des choses toujours intéressantes, qui ne le concernent qu'en tant que paradigme , de façon barthésienne.
"Hou lala ! "paradigme", barthésienne", kè ki dit, l'prof", je les entends d'ici, les villageois...
Et merci pour votre apologue du nain de jardin.
Comment proposer un commentaire à la fois pertinent, impertinent et qui ne soit pas hors sujet, à un post (un article) du blog qui porte sur « le village » et qui promet en même temps de bannir tout commentaire sur « le village » ? L’espace de liberté semble bien ténu !
Eh bien, sans forcer la main de Frank Thomas (j’aurais du mal !) je proposerais (j’y mets donc le conditionnel) cette entrée en matière : la paternité du nom de « village » appliqué au « village » m’appartient d’une certaine façon ! En effet, depuis 2007, je jouis (en égoïste jusqu’ici) sur le nom de « village » appliquée au « village » d’une sorte d’antériorité comme on dit à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) où il me faudra songer à déposer un jour la marque Le Village ®. Pour l’instant, le nom de « village » appliqué au « village » n’est justifiable que d’un copyright que je revendique (en rigolant)…
En 2007 donc, j’avais réalisé au village la première des nombreuses interventions artistiques que j’y ai menées par la suite et qui consistait en l’installation, en vitrine — et donc visible de jour comme de nuit, de la sculpture d’un nain de jardin du commerce posée sur un socle ad hoc et mise en regard d’une photographie de ladite sculpture, tirée à « taille réelle », c’est-à-dire celle d’un homme « normal ».
Je relève au passage (et sans vouloir me hausser du col plus que ça) que cette fonction assignée à l’image du nain (à la fois donc présenté et représenté) avait quelque chose de prémonitoire puisque nous avons depuis quelques jours un président de la République « normal ». (Les normes ont toujours quelque chose d’effrayant, me semble-t-il, lorsqu’elles sont appliquées aux personnes ; et un président, fût-il un président de la République, est tout de même une personne). Un critique d’art et éminent curator (en français : un commissaire d’exposition — qui n’a rien à voir dans la plupart des cas avec un commissaire politique) m’avait alors écrit avec infiniment de justesse que « le nain n’est pas petit. Il est loin ».
Où j’en reviens au village : l’œuvre, portant sur le rapport de l’objet avec son image, avait pour titre « I am The New Nr 2 » (Je suis le Nouveau Numéro 2) et faisait référence à la série télévisée britannique « Le Prisonnier » ; série culte des70’s (comme on dit depuis) et dont les jeunes générations d’aujourd’hui raffolent encore plus. Celle-ci mettait en scène le Prisonnier (alias le Numéro 6) joué par le réalisateur — Patrick Mc Goohan ; le Numéro 2 (remplaçable, et remplacé à chaque épisode) ainsi que le majordome joué par le nain (pardon : l’individu de petit taille) Angelo Muscat, quasi-muet (une sorte de petit rôle).
Le générique de chacun des 17 épisodes faisait entendre (dans sa version française) un dialogue que je ne résiste pas au plaisir de rappeler :
« Où suis-je ?
– Au village.
– Qu’est-ce que vous voulez ?
– Des renseignements.
– Dans quel camp êtes-vous ?
– Vous le saurez en temps utile … Nous voulons des renseignements. Des renseignements. Des renseignements.
– Vous n’en aurez pas !
– De gré ou de force, vous parlerez.
– Qui êtes-vous ?
– Je suis le Nouveau Numéro 2.
– Qui est le Numéro 1 ?
– Vous êtes le Numéro 6.
– Je ne suis pas un numéro, je suis un homme libre ! »
Si l’œuvre plastique (la statue du nain et son image surdimensionnée) est toujours vendable, l’homme libre quant à lui ne l’est toujours pas. A la fin (de la série télévisée), le Prisonnier réussissait à se casser, emmenant avec lui le nain-majordome. Le Numéro 1 ?
A l’ère du numérique proclamée (et alors donc que l’on peut trouver « Le Prisonnier » en DVD), est-il encore permis à chacun de jouer avec les analogies ?