VEF Blog

Titre du blog : Le journal de Frank THOMAS
Auteur : Frank-Marie-THOMAS
Date de création : 20-09-2009
 
posté le 05-12-2013 à 12:57:20

"Un si charmant village" (11)

Cette chronique, comme toutes les chroniques, est un récit d'évènements passés. Des évènements encore récents pour les lecteurs de plus de 45 ans, mais préhistoriques pour les autres. Ainsi va le monde.

Je l'ai entreprise pour deux raisons. La première c'est que ayant été durant un quart de siècle une sorte de personnage dans ce village, ayant à quatre reprises sollicité les suffrages de mes concitoyens, je dois la vérité aussi bien à ceux qui m'appréciaient qu'à ceux qui me détestaient, souvent pour les mêmes raisons d'ailleurs. Les seconds, instruits depuis par les invraisemblables disputes et retournements de 2008, quand les fidèles d'hier lâchèrent le tyran mou qui les avait asservis si longtemps, mesurent assurément à présent à quel point ce qui m'était arrivé 25 ans plus tôt était annonciateur de la suite.

Mais n'anticipons pas.

Dans le dernier numéro de cette chronique, je me proposais de revenir sur le rôle de la presse régionale durant les évènements que je relate ici.

Le département auquel le village appartient, l'Yonne, a ceci de particulier qu'un seul journal le couvre, chose assez rare et vraiment fâcheuse. Comme cet organe qui se vante d'être l'héritier de l'esprit de la Résistance règne en maître sur ces campagnes, il fait la pluie et le beau temps à son gré.

J'ai eu à souffrir, comme d'autres, de ce monopole malsain. Ce quotidien fait certes essentiellement dans les accidents de la route, les intempéries, les assemblées générales d'associations de boulistes ou de personnes du troisième âge, portant la louange et l'optimisme en bandoulière.

Faible, très faible même en matière d'information nationale et internationale, il s'est depuis longtemps spécialisé dans le traitement du "local", avec tout ce que cela comporte à la fois d'erreurs de parallaxe et d'inévitables déformations.

Le village disposait - et je suppose dispose toujours - d'un bureau du journal. Le journaliste ou le pigiste responsable de cette antenne est un personnage. Présent aux manifestations publiques, il l'est aussi à chaque séance du conseil municipal.

De sa bonne ou mauvaise volonté dépend l'idée que le lendemain ses lecteurs se feront de ce qui s'est passé. Comme un autre organe de presse n'est pas là pour donner un autre point de vue que le sien, ses mots ou ses silences tracent le contour non pas de sa vision mais de la vérité. " C'est écrit dans le journal" , qui donc en douterait ? "Le journal n'en parle pas" qui peut admettre que cela soit important ou même tout simplement que cela soit ?

On voit qu'avec une position aussi exclusive, le journaliste devrait se faire une obligation déontologique de précision, d'exhaustivité, de vérité ou à tout le moins d'impartialité. C'est ce qui n'est pas.

Hormis à deux - très brèves - reprises, nous n'eûmes jamais autre chose que des approximations, des semi-vérités, des déformations volontaires, même.

Le maire déclarait-il quelque chose devant le conseil ou à telle ou telle occasion officielle ? Ses propos étaient repris comme étant fondés sur des faits indubitables et jamais ni vérifiés, ni remis en cause.

La formule par laquelle ses propos étaient présentés rendait en général un son d'authenticité factuelle et indiscutable. C'était  " le maire indique" ou "signale". Répondais-je à ce qu'il avait dit ? On faisait précéder mes paroles d'un " Monsieur Thomas prétend" ou "risposte", induisant dans l'esprit du lecteur superficiel, que mes assertions étaient douteuses et mon ton polémique et violent. On  créait ainsi subrepticement, jour après jour, un personnage imbu de lui-même, insensible à la bonne volonté du maire, vindicatif et excité.

Parfois, lassé de cet épuisant et stérile combat, je rencontrais le journaliste pour lui montrer l'évidence de ce parti-pris inadmissible. Cela ne faisait que l'aigrir davantage et l'article suivant était encore plus calamiteux. J'en pris donc mon parti, battu d'avance par ce front commun entre le "pouvoir" et le journal qui à l'évidence ne voulant pas tarir les sources de son information, se devait de ménager le maire et ses affidés et de gagner leur bienveillance en me maltraitant.

Si les citoyens avaient été cultivés et réellement adultes, formés au déchiffrage de la presse et en garde contre les pièges d'une information orientée, jamais l'opposition dont je faisais partie n'aurait eu un tel mal à se faire entendre.

Jamais la ridicule "affaire" de la photocopieuse ou de l'insulte au premier adjoint n'aurait été plus loin qu'un grand éclat de rire, à la confusion du maire et de ses afiidés.

Je m'étend un peu sur ce sujet parce que je sais que ce qui m'est arrivé dans le village se reproduira toujours tant qu'un seul organe de presse règnera en maître absolu, incité par ce monopole à se laisser aller tant sur la forme que sur le fond, et à tordre ou tronquer la vérité au gré de ses intérêts particuliers.

C'est une question extrêmement sérieuse.

 

Commentaires

Frank-Marie-THOMAS le 06-12-2013 à 12:22:22
@ villageois


Vos encouragements, cher Monsieur, sont très aimables. J'ai bien, en effet, l'intention de poursuivre cette chronique jusqu'en 2008, d'abord, puis jusqu'à aujourd'hui, qui ne s'explique que par hier.

Votre idée de mettre ce blog en lien avec le journal local est bonne; mais il me semble que cette publication pourrait d'elle-même le faire et que si ce n'est pas le cas, cela ne ferait que confirmer la piètre opinion que j'ai de lui et de ceux qui y travaillent.
villageois le 05-12-2013 à 22:09:58
Je vous en prie, Continuez!

Ne vous arrêtez pas en si bon chemin.

Ce feuilleton et bien plus passionnant que les meilleures séries télévisuelles.

Le lien de ce blog devrait être envoyé au journal local afin qu’il puisse apprendre à écrire et aussi s’informer.

Bien à Vous Monsieur.