Depuis une vingtaine d'années - mais le phénomène vient de plus loin - on a laissé en France s'instaurer des dérives qui, toutes, partent de bons sentiments, mais dont le résultat confine parfois au désastre.
Au nom du Bien Public, de la Morale et de la Sécurité, on nous a emmaillottés dans tout un réseau de bandelettes qui à présent nous immobilisent et nous étouffent.
Je ne reviendrai pas - c'est l'objet d'un récent billet ici-même - sur la catastrophe présente et avenir du terrible "principe de précaution" : aussi bien chacun d'entre nous peut en observer les effets néfastes sur sa vie de tous les jours.
Je glisserai aussi sur la complexité toujours grandissante des contraintes administratives que Monsieur Hollande, avec l'humour qu'on lui connaît, appelle du joli nom de "choc de simplification".
Je passe sous silence l'amas de plus en plus épais de règles, interdits, pressions diverses tendant tous à faire entrer le citoyen dans un moule réputé garantir l'ordre public et la sérénité sociale et, pire encore, la norme morale. Cela touche tous les domaines de la vie courante, même la plus privée : utilisation du chauffage, cigarette, ceinture de sécurité, casque, triangle orangé, gilet jaune, vistesse progressivement réduite, punitions familiales, flicage généralisé et rendu implaccable par les progrès de la technique informatique, repérage de chaque citoyen par son téléphone, sa carte vitale, sa carte bancaire, jonctions informatiques entre les services publics, les réseaux sociaux, les blogs, "grandes oreilles", etc.
Je voudrais pour aujourd'hui m'en tenir à ce qui est apparemment moins prégnant sur notre vie de tous les jours mais qui, selon moi, est à la fois cause et conséquence de ce dont je viens de parler : la confusion de plus en plus grave entre mythe et histoire, l'obligation de croire et non plus de savoir.
Depuis Henri IV, avec entre temps des reculs et des avancées, la France se sécularise et depuis 1905 et la grande loi de séparation des Eglises et de l'Etat, elle est censément devenue tout à fait laïque.
Cette libération par rapport aux contraintes et aux interdits religieux n'a pas duré bien longtemps, ou plutôt - comme si décidément la liberté de conscience était un trop lourd fardeau pour nos concitoyens - elle a été grignotée par une religiosité d'un genre nouveau, débarrassée, certes, de sa dimension mystique, mais chargée d'un poids mythique plus lourd encore, s'il se peut.
L'histoire de l'Antiquité, par exemple, nous est racontée à travers le prisme déformant du christianisme et passe, dans le public, assommé par tout un corpus sacré de livres consensuels et convenus et de films hollywoodiens, pour vérité vraie.
Il n'est pas permis de douter que Néron ait été un monstre, qu'il ait lui-même mis le feu à Rome pour pouvoir massacrer les chrétiens; que ceux-ci étaient de doux agneaux, etc.
Quand on sait - la lecture du petit livre que j'ai recommandé ici-même il y a peu est de ce point de vue importante (voir article en lien) - que ces mêmes chrétiens ont su se montrer sanguinaires, fanatiques et destructeurs de toute trace de civilisation humaniste dès la fin de l'Empire Romain; quand on observe les ravages et les guerres que ce même fanatisme a causé au Moyen-Age, durant la Renaissance et dans la suite; quand on voit, sous nos yeux, l'état du monde actuel et la part gigantesque des religions dans tous les conflits qui l'ensanglantent, on reste confondu devant tant de mauvaise foi.
Or voici qu'à travers des lois dites "mémorielles", on voudrait empêcher que la recherche historique ne se focalise sur tout ce qui, depuis plus d'un siècle, nous est présenté comme vérité intangible.
Je ne parle pas là, bien sûr, des horreurs inhumaines commises par le régime nazi et ses imitateurs anciens ou modernes : en aucun cas les documents dont nous disposons ne peuvent laisser la moindre place à un quelconque révisionnisme, qui est un crime sur le crime. Les nier dans leur authenticité ou vouloir en minimiser la portée a de quoi donner la nausée à tout homme épris de vérité. Ceci, bien sûr, ne signifiant aucunement que les historiens n'ont plus rien à apporter sur cette sombre période de l'histoire européenne et mondiale.
Mais il est grave de ne pas pouvoir, tant d'années après, faire l'exacte et scientifique lumière sur les réalités de l'esclavage; sur les crimes de la Convention Nationale contre Lyon, la Vendée, la Guadeloupe, etc.; sur les différents génocides; sur le pacte germano-soviétique; sur le rôle exact de Jean Moulin et de de Gaulle dans l'organisation de la Résistance; sur la suspecte arrestation du même Jean Moulin; sur l'aide apportée par les USA au Vietmin, au FLN, aux talibans d'Afghanistan, etc.; sur la guerre d'Algérie; sur le coup d'Etat de mai 58; sur le rôle du Vatican durant la seconde guerre mondiale, etc.
Tous sujets qu'on n'aborde qu'à pas feutrés, en suivant une feuille de route préétablie.
Il est également plus que regrettable de ne pas pouvoir oser mettre en doute les dogmes écologistes sans passer pour un affreux réactionnaire productiviste et carrément criminel.
Il semble que tous ces sujets, pourtant passionnants et dont l'étude libre et décomplexée apporterait de la sérénité à notre société qui en a tant besoin, sont devenus des tabous qu'il serait impie - comme s'ils étaient cachés au fond des archives de Au Nom de la Rose - d'aller dépoussiérer pour les étudier d'un œil serein.
Vive la liberté ! Liberté de chercher, de trouver, de penser.
Hors de cette liberté, nous retomberons dans ce dont, depuis des siècles, nous nous sommes acharnés à nous extraire et ce pourquoi nos ancêtres se sont battus, ont souffert et sont morts.
N.B: Pour ceux d'entre vous qui veulent en savoir plus, je donne ci-après la liste (incomplète) des articles que j'ai consacrés peu ou prou au même thème dont on peut voir qu'il me tient décidément à cœur, et qu'il représente sans doute l'axe principal de ma façon de voir les choses.
Commentaires
Ce point de vue "de Sirius", cher Fugace, me convient tout à fait, et il faut effectivement toujours se le rappeler pour évaluer , comme disait Pascal, ce qu'est un homme dans l'infini.
Mais mon propos était plus terrestre, et dans cette optique, sans attendre la fin des temps astronomiques, il me semble qu'il y aurait quelques progrès à faire.
Bonjour F.T.
Il y a aussi la dérive des continents...!
Les grands cycles effaceront (écraseront) toujours tout sur leur passage, pour mieux (ou non ) recréer selon une complexité qui nous échappe encore grandement.
Au-delà, en ce début de XXIème (après JC), il est encore fort probable que les « mémoires » ancestrales inscrites par les transmissions orales et ou écrites, avec ou sans réelles vérités, et peut-être même celle accumulée et conservée sous forme de programmes génétiques, ne soient pas suffisantes pour espérer modifier avec perceptibilité ces « grands cycles » climatiques, économiques, religieux, sociétaux qui n’ont de cessé de se succéder tout en se répétant depuis des millénaires. Tout au plus les cycles climatiques, scientifiques et politiques pourront-ils de temps à autre modifier temporairement leur propre trajectoire selon leurs spécificités et leur intensité.
Les longues très longues périodes alternatives vont donc continuer à se se succéder obligeant sans cesse l’humain à s’adapter, pour son bien être et sa survie, d’abord à la « nature », et ensuite aux autres très nombreux concurrents immédiats dont son principal ennemi : l’humain.
Qu’est-ce que 100ans ou même cinq siècles à l’échelle de la planète sans même penser à celle notre galaxie pour les grains de sable que nous sommes ?