Soutenir mordicus que jamais la justice n'a été aussi indépendante du pouvoir politique est une absurdité qui fait rire. Certains, pourtant, osent.
Cette indépendance absolue des juges serait évidemment souhaitable; elle serait en tout cas tout à fait inouïe dans un pays où cela ne s'est jamais produit, ni sous l'Ancien Régime, ni sous l'Empire ni sous la République.
Certes il n'est pas douteux que Monsieur Sarkozy en usait de façon cavalière avec les juges, et son désir de les contrôler ou à tout le moins de les surveiller est clair pour toute personne de bonne foi.
Mais à qui fera-t-on croire qu'un gouvernement - celui de Monsieur Ayrault et celui de son successeur - qui a instrumentalisé des écoutes illégales entre un avocat et son client durant de longs mois, en toute illégalité, dans l'espoir de glaner quelques éléments à charge et où un Garde des Sceaux ment effrontément devant les Français sans être sanctionné par ses supérieurs, respecte l'indépendance de la justice ?
Ces pratiques, qui dans tout pays vraiment démocratique auraient suscité un scandale et provoqué la chute des responsables, semblent ne choquer personne, et le cynisme d'Etat - progressivement installé depuis les barbouzes gaullistes, le SAC de Pasqua, les écoutes de Mitterrand, les dérapages de Chirac et ceux de Sarkozy - en est arrivé à un point tel que le scandale ne semble plus devoir tuer personne.
Venir dans un climat aussi délétère nous chanter le grand air de la vertu retrouvée sous prétexte que Sarkozy est le vaincu du jour, est le signe d' esprits plus vindicatifs qu'épris de vraie justice.