88 % !
88 pour cent de candidats au baccalauréat ont "décroché le précieux sésame", comme on dit chez les journalistes.
Une rectrice d'académie explique à cette occasion que si en 30 ans on a triplé le taux de réussite au bac c'est la preuve chiffrée du meilleur niveau des élèves de terminale.
Tout au long de ma carrière de professeur j'ai dû subir ce genre de contre vérité et pour tout dire d'ânerie.
La même dame nous rappelle que les épreuves sont aussi difficiles que naguère. C'est vrai; mais précisément à cause de cela on a excipé de la difficulté des sujets pour justifier une hausse généralisée des notes et une baisse dramatique du niveau d'exigence. Toute une série de stratagèmes techniques ou psychologiques sont mobilisés à cet effet, jusqu'à pointer du doigt, lors de réunions professionnelles, les collègues dont les notes sont trop éloignées de "l'écart type", pour les faire rentrer dans le rang.
Cette trouvaille technocratique est un puissant moyen de pression, notamment sur les enseignants précaires - de plus en plus nombreux - pour les mener à "noter bien".
Non seulement les statistiques de réussite au bac ne sont pas signe d'un quelconque accroissement du niveau des élèves, mais elles sont plutôt un symptôme inquiétant de la dérive de notre système éducatif.
Ces hordes de bacheliers lâchés dans les universités les encombrent inutilement, puisque toute réelle réussite leur est inaccessible dans cette voie; de plus ils constituent un poids gênant pour ceux qui, au contraire, sont en mesure de réussir de bonnes et fructueuses études.
Ce bac dévalué qui sera bientôt donné à tout le monde n'est pas un cadeau à notre jeunesse, bien au contraire.
Les 88 % sont un pitoyable cache-misère et un moyen grossier de contourner les insuffisances criantes de l'enseignement professionnel et de l'apprentissage en France.