En traversant le magnifique département de l'Aveyron et le plateau du Larzac, ne sais pourquoi m'est revenue à la mémoire la chanson de Jean Ferrat Que la Montagne est belle . Il chantait, lui, ses monts d'Ardèche.
Cette chansonnette, dont je n'arrivais pas à me déprendre - comme souvent au volant - dit à un moment, parlant des paysans qui quittent leurs montagnes pour aller se perdre dans l'univers gris des villes :
Il faut savoir ce que l'on aime
Et rentrer dans son HLM
Manger du poulet aux hormones.
Ferrat a bien fait de chanter cela dans les années 70, à l'époque où les bobos parisiens pacifistes et vent debout contre l'extension du camp militaire, cheveux longs, chemises à fleurs, pantalons évasés du bas, écolos urbains, partisans de la vie communautaire et de l'amour libre, bercés par les chansons de Joan Baez et des Pink Floyd scandaient " Gardarem lo Larzac !"
Aujourd'hui je gage qu'il serait condamné pour avoir méconnu les difficultés des petits paysans forcés par la misère de chercher du travail dans les grandes villes, d'habiter de sinistres banlieues et, en effet, de manger du poulet aux hormones.
C'est que notre temps, hélas, ne rit plus avec n'importe quoi.
Et puis la légion, discrètement, s'installe au Larzac...
Commentaires
@ icaunaise.
J'ai dû mal m'exprimer, car vous m'avez mal compris.
Le sujet de ce petit billet d'humeur n'était certes pas d'émettre la moindre critique à l'égard des paysans des Causses; si vous en trouvez une, ne manquez pas de me la signaler. Il ne portait pas plus sur celle des bobos de l'époque dont je ne crois pas brosser un portrait antipathique.
Mon sujet était la liberté d'expression qui, depuis deux décennies au moins, va se rétrécissant comme peau de chagrin.
Ferrat, c'est ce que j'ai essayé de dire, a eu raison d'exprimer le regret de l'abandon des campagnes, et il le fait avec une violence dans les mots dont j'affirme qu'elle lui vaudrait aujourd'hui les critiques acerbes des descendants de ces bobos de 70.
Votre réaction, ne m'en veuillez pas de vous le dire carrément, est assez emblématique de ce que je décris dans ce petit texte, à savoir une fâcheuse tendance de notre époque à la pensée conforme et donc à la censure.
J'espère en tout cas que ce n'est pas votre mode habituel de pensée, sinon ce blog vous sortira vite par les yeux.
Outre les bobos parisiens pacifistes, il était d'abord et avant tout à l'époque question des paysans du Larzac qui défendaient leur terre. Ce sont eux qui se sont révoltés et ça ne c'est pas fait en chansons mais dans les larmes et la douleur. Que ne vous êtes-vous donc arrêté sur le plateau, que n'êtes-vous allé les voir ces paysans du Larzac qui auraient eu tant et tant de choses à vous conter. Pour les bien connaître et pour les fréquenter de près, je peux vous assurer que ce sont des hommes de valeur et de courage. Et oserais-je ajouter que même les bobos parisiens (dont je n'étais pas) ont apporté leur pierre à l'édifice... Quelquefois les paysans du Larzac étaient au bord du découragement et ce sont ces bobos parisiens qui les ont soutenus par leur naïveté et leur insouciance. Cela a été une dure épreuve mais les paysans du Larzac ne se bercent pas d'illusions : ils savent que hormis les bobos parisiens qui les ont soutenus (quelques petites dizaines de milliers, c'est un bien faible pourcentage de la population française) les français se fichaient éperdument de leur sort. Mais voyez-vous en souvenir de ceux qui se sont battus et dont la plupart ont quitté cette terre, je crie encore tout au fond de moi : "gardarem lou Larzac"