A l'occasion de la polémique suscitée par les paroles de Mme Morano à propos de la "race blanche", un débat surgit une nouvelle fois pour savoir s'il convient ou non de le maintenir dans le texte de la Constitution de la République.
Je l'ai évoqué à la fin du précédent article, j'y reviens aujourd'hui.
Commençons par rappeler le texte exact :
" La France est une République laïque démocratique et sociale. Elle assure l'égalité tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion."
Si, comme j'ai régulièrement l'occasion de le dire ici, je suis à la fois amusé et irrité par les frilosités ridicules qui prétendent épurer notre vocabulaire, je pense qu'il ne faut pas pour autant s'interdire de réfléchir à l'emploi abusif de certains mots qui peuvent parfois être aussi dangereux que des armes.
Il n'est pas absurde, par exemple, de proposer que le mot "race" soit supprimé du préambule de la Constitution française.
En effet, le seul fait de dire que la République se refuse à instaurer des différences de traitement entre des personnes de races différentes suffit évidemment à donner une réalité à l'existence de races humaines, ce que la science à démontré être faux.
Ainsi la bonne intention qui présida à la rédaction de ce texte aboutit en réalité à donner corps à une chimère dangereuse.
Il est donc tout à fait sensé de vouloir effacer ce mot de ce texte, sans, bien sûr, l'effacer de notre lexique.
Commentaires
Il reste que le concept, sinon le mot, semble universellement répandu (quasi instinct de classification ancré dans le cortex ???) mais interdit chez nous, rejeté comme essentialiste,... Glissant, Senghor, Césaire se réclament de la négritude...
et récemment une apparatchik de la "lucarne à blaireau" (i.e le petit écran) disait qu'il y "avait trop d'homme blancs à la télévision"... (les statistiques ethniques sont pourtant interdites)
L'homme blanc de peau se pense toujours supérieur, le seul à se vanter (à juste titre, semble-t-il) d' avoir aboli l'esclavage , ne dénonçant que la traite atlantique... jamais la trans-saharienne ou l'africaine, dont nous avons profitée pendant 350 ans (?)
L'homme blanc droit-de-l'hommiste se classe bien dans une catégorie supérieure, universaliste qui effectivement n'a rien à voir avec la race...
Quand on dit que la philosophie est née à Athènes, quand Allègre dit que la science est née dans l'université française au Moyen-Age, quand Toynbee dit que c'est la science occidentale qui a pénétré les cultures sans résistance (mais ni la philosophie, ni les religions) ... la constante de Planck elle, est universelle) faut-il y voir une tentative de revenir à la hiérarchisation ...
Les Jules Ferry, les Paul Bert, les Savorgnan étaient-ils républicains??? Ils utilisaient plutôt le concept de civilisation...qui n'est t pas exempt d'une notion de supériorité...
Quand l'islam, soumet juifs, chrétiens et mécréants au statut de dhimmi, il n'y a pas de notion raciale... mais le statut d''infériorité est bien présent.
Monsieru Sarkosy avait dit que l'Afrique "entrait dans l'histoire"... il voulait dire l'histoire écrite... (???)
On pourra objecter que les hiérachies peuvent s'inverser: les inuits ont une vingtaine (???) de termes pour décritre l'état de la neige que les boshimans Kung survivent dans le Kalahari là où nous ne pourrions vivre que quelques ... heures...seraient donc mieux armés contre le réchauffement.
La notion de race doit être abandonnée sous peine d'essentialisme (Levi-Strauss, génétique des populations)... ce qui ne supprimera pas le besoin de classification, de hiérarchisation
@ Frank Thomas
Bien sûr vous avez raison. A la fois pour l'approximation et pour l'Histoire tragique associée à ce mot.
En faire l'impasse serait une erreur évidemment car, pour faire progresser les esprits, je crois aux vertus de l'éducation, de la culture, de l'apprentissage du passé avec ses grandeurs et ses horreurs.
Merci d'avoir précisé.
@Galinette
Je suis en presque total accord avec vous sauf sur un point, mais important et que j'ai essayé d'éclaircir dans mon billet.
Le mot race, concernant les différents aspects sous lesquels apparaissent les hommes, est une approximation fausse; il en va de même, d'ailleurs, pour les chiens, puisque vous en parlez.
A ceci près, tout de même, que "race" appliqué à l'Homme est chargé d'une lourde et tragique histoire dont on ne peut pas faire l'impasse.
Je n'arrive pas à saisir ce qu'il y a de raciste a parler de races. Ne parle-t-on pas de races de chien ou de chat? Un cocker ne ressemble pas a un caniche. On demande sans problème : "de quelle race est votre chien?". Personne n'y met de connotation péjorative ou de hiérarchie.
Cela souligne simplement une différence, une singularité et répond a un besoin humain de classification. On a mis des siècles, dans nos sociétés dite civilisées à avancer sur la reconnaissance et l'acceptation ( difficile et encore inachevée loin s'en faut) des différences. Et voilà qu'on s'arrête en chemin depuis une petite décennie. On prétend gommer ces différences, éradiquer les subsistances de racismes en légiférant sur le vocabulaire, en niant une réalité plutot qu'en analysant ses contours multiples. Absurde et contre-productif.
La phrase de Tony Morrison est magnifique.
Comme j'aimerais que tous ces politiques, ces journalistes incultes, tous ces hâbleurs qui tiennent le haut du pavé et nous harcèlent de paroles moralisatrices se taisent. Ils ne font qu'attiser les haines et rigidifier les relations humaines. Tout est désespérément biaisé, faussé. C'est effrayant.
"Soutenir l'absence de race dans le discours littéraire est en soi un acte racial.Le monde ne devient pas sans race ni ne sera déracialisé grâce à des affirmations."
Page 68 (Playing in the dark/Blancheur et imagination littéraire)/Toni Morrison.
Quant au texte de la Constitution de la République,en ce qui me concerne,le mot "race" est en trop.
Donc,je vote si vote il y a, pour sa suppression!
Mais hélas,la suppression du mot dans le texte en question ne supprimera pas le racisme dans la tête des gens.
Sur les forums,ce ne sont que des discours haineux à l'égard des étrangers qui ont bonne presse!