Selon toute vraisemblance, le président de la République est sur la voie du renoncement à l'utilisation de la déchéance nationale.
Cette reculade, qui n'est pas la première depuis le début de son mandat, est hautement symbolique. C'est en effet dans le cadre le plus solennel que la République puisse offrir que la promesse avait été faite.
Il y a un mois, devant le Parlement réuni en congrès à Versailles, dans une ambiance d'union nationale après les épouvantables attentats du 13 novembre, François Hollande annonce qu'il est favorable à la déchéance de nationalité pour les citoyens ayant une double nationalité, même s'ils sont nés français, à condition, bien sûr, que le Conseil Constitutionnel l'approuve.
Cette annonce avait alors suscité une sorte d'unanimité, seuls quelques parlementaires ayant émis des réserves.
Voici que devant les réticences de plus en plus ouvertement exprimées par l'aile gauche de leur majorité qu'ils veulent ménager en vue de l'élection présidentielle de 2017, Hollande et Valls s'apprêtent à enterrer cette idée qui pourtant vient d'être considérée comme légale par le Conseil Constitutionnel.
La raison invoquée pour justifier cet incroyable et soudain revirement est que cette mesure serait inefficace.
C'est là un argument d'une totale mauvaise foi. Personne, en effet, n'a jamais cru que la menace d'être privé de la nationalité française pût faire renoncer à son projet un individu décidé à se faire exploser. Le caractère dissuasif de cette mesure - quand on sait que la peine de mort elle-même serait en l'occurence inefficace - est absolument nul.
Mais cet argument pragmatique est hors sujet. La déchéance de nationalité qui consiste à rejeter hors de la communauté nationale un individu qui a accompli un acte criminel envers la nation est une peine infâmante dont la raison d'être, précisément, est dans son caractère infâmant.
Y renoncer pour pouvoir poursuivre sa petite tambouille politicienne est à la fois imbécile et honteux.
Imbécile parce que cela envoie un message de faiblesse dont le pays n'a surtout pas besoin en ce moment; honteux parce que c'est une trahison de la parole donnée.
Le président et son gouvernement,Christiane Taubira en tête, nous expliquent que pour remplacer la déchéance de nationalité pour les bi-nationaux, il faut les poursuivre pour indignité nationale.
L'indignité nationale crée en 1944 pour punir les collabos est un chef d'accusation dont la sanction est la dégradation nationale.
Celle-ci ôte au condamné le droit de voter, d'être élu, de faire partie de la fonction publique, de diriger une entreprise, d'être membre d'un syndicat, d'exercer des professions juridiques, de journalisme, de posséder des armes.
A première vue, donc, la dégradation nationale qui sanctionne l'indignité nationale est une peine tout aussi dissuasive que la déchéance de nationalité. Mais à première vue seulement.
L'individu frappé de dégradation nationale reste tout de même français. Ses droits sont réduits à presque rien, certes, mais il continue de faire partie de la communauté nationale.
La déchéance de nationalité, elle, le retranche du corps social, vivant ou mort.
Dans le titre de cet article, je pose la question du choix entre déchéance ou indignité.
La reculade de Hollande et de Valls qui, derrière leurs attitudes et leurs discours martiaux ont du mal à dissimuler leur lâcheté et leur faiblesse, est à mes yeux à la fois une déchéance et une indignité.
Ajouté le même jour à 18 h :
Revirement sur revirement; il semble que le président de la République souhaite maintenir, finalement, la déchéance de nationalité dans la Constitution. Si tel est le cas il aura échappé à l'indignité. Encore faut-il que sa majorité le suive.
A dire vrai Hollande lorsqu'il promis cette mesure le 16 novembre devant le Congrès espérait certainement que le Conseil d'Etat la repousserait. Celui-ci l'ayant considéré comme constitutionnelle, le président, contrairement aux affirmations imprudentes de Madame Taubira hier à Alger, après avoir hésité, a fini par s'en tenir à sa promesse.
La gauche de son parti est mécontente; mais la Droite est en quelque sorte piégée, forcée de voter un texte qui va dans son sens. On nage en pleine politicaillerie.
Commentaires
"La déchéance de nationalité, elle, le retranche du corps social, vivant ou mort."
Pour ma part, je ne me suis pas encore convaincu de la hauteur de la démarche.
Il eut fallut bien poser les circonstances des actions. Temps de paix ou temps de guerre véritable.
En temps de guerre, on parlera avec justesse de terrorisme, alors pourquoi pas un tribunal militaire avec toutes les conséquences violentes pour la ou les individu(e)s concernées ?
En temps de paix, même si le résultat des actions c'est aussi le même nombre de victimes, la démarche de la justice ne pourra jamais être la même. Ou alors, il faut rétablir la peine de mort.
J'ai lu récemment le papier de
François-Xavier Bellamy : «L'année 2015 a été celle du choc des incultures» / Figarovox.
Je suis convaincu que la République porte une lourde responsabilité s'agissant des 10 000 fichés à risques (à minima) au sens de leur radicalité potentielle. Ou est l'action de choc nécessaire ?
Certainement pas l'Etat d'urgence pendant lequel les voitures brûlent quand même !
Quand vous écrivez On nage en pleine politicaillerie vous vous voulez dire en plein bordel ?????
Si j'en crois les informations télévisées de ce midi, on a reculé sur la reculade. La cacophonie continue ...
Vais m'abstenir de répondre.