Le 6 mars 2010, à la suite d'une visite de la basilique royale de Saint-Denis, je consacrais un billet au roi Henri III. ( voir article en lien)
Certains lecteurs ont pu alors s'en étonner, vu la réputation sulfureuse de ce souverain et le monceau d'horreurs qu'on a débité sur son compte au fil des siècles.
Fourbe, égocentique, futile, livré à ses mignons, impliqué, peut-être dans la mort de son frère Charles IX, coupable du massacre de la Saint-Barthélémy, et j'en passe.
Rien de toutes ces accusations infâmantes ne tient à un sérieux examen historique.
Heureusement certains chercheurs consciencieux dissipent peu à peu ces rumeurs et essayent de rétablir la vérité historique.
Déchiré entre les protestants soutenus par l'Angleterre et la ligue extrêmiste catholique financée par le roi d'Espagne, ces deux royaumes ayant la claire intention de se partager les dépouilles de la France, Henri III dut lutter à la fois contre son cousin huguenot, Henri, roi de Navarre, et contre la Ligue menée par deux ambitieux sanguinaires : le duc de Guise et son frère, le cardinal de Lorraine.
Massacre de la Saint-Barthélémy à Paris.
Les pamphlets, les caricatures ignobles, les accusations sanglantes ne firent pas reculer l'un et l'autre camp.
D'un côté les délires d'un Agrippa d'Aubigné, de l'autre les prêches hystériques des moines ligueurs.
Comment l'image du Roi n'en eût-elle pas été souillée dans l'esprit du peuple et des grands du royaume ? Comment ces ignominies ne seraient-elles pas parvenues jusqu'à nous ?
C'est cette image mensongère et doublement partisane qui, hélas, continue de régner parmi nous.
Or ce roi fut de toute la lignée des souverains de la France celui, avec deux ou trois autres - parmi lesquels Louis XI - auquel au contraire devrait aller la gratitude du peuple; celui-ci d'ailleurs la reporta, non sans raison, sur son successeur, le roi de Navarre devenu grâce à lui roi de France. C'est pourquoi je lui rends hommage en mettant son visage spirituel et fin en haut de cette page.
Car Henri III, martyre du fanatime religieux, lâchement assassiné par le moine fanatique Jacques Clément lui même instrumentalisé par le parti ultra-catholique ( comme vingt ans plus tard le fut Ravaillac), eut une double audace qui sauva le royaume d'une mort certaine.
Il fit tuer le duc de Guise, et son frère le cardinal de Lorraine qui ne prétendait pas moins qu'à devenir roi en titre sous l'autorité du roi d'Espagne.
Le neveu du pape Médicis faisant assassiner un cardinal ! Qui, dans notre histoire, eut une audace plus grande, en un temps de superstition où, pour moins que cela, on encourait l'excommunication et la "damnation éternelle" ?
Mais, aux yeux du Roi, seules comptaient l'unité et la survie de la France.
On peut dire qu'Henri III fut le véritable fondateur de notre nation moderne.
Et le coup de génie politique final achève le portrait de ce grand souverain : frappé à mort par le couteau du moine en son château de Saint-Cloud le premier août 1589, il fit jurer aux seigneurs présents dans sa chambre de se ranger sous les ordres de celui qu'il avait pourtant combattu sa vie durant et qu'il avait battu, le 13 mars 1569 (anniversaire) du temps qu'il était duc d'Anjou, à Jarnac.
Il s'agit de son cousin Henri, le chef du parti protestant; le Roi recommanda à celui-ci d'abjurer sa religion réformée et de se faire catholique pour ramener paix et sérénité dans le royaume. Splendide conseil, inspiré par la sagesse de Montaigne, et qui devait se révéler si essentielle au bonheur des Français !
Henri III à son lit de mort, Henri de Navarre à ses côtés.
La célèbre phrase " Paris vaut bien une messe" que prononça Henri IV, fonde ce qui, plus tard, deviendra la laïcité à la française. On la doit au dernier des Valois.
En ce sens la figure d'Henri III a sa place dans la galerie glorieuse des victimes du fanatisme religieux et de ceux qui ont oeuvré pour la concorde et la paix civiles.
Je ne sache pas qu'au cours de notre histoire une telle lucidité et un tel courage se soient jamais vus.
Grâce à lui, le royaume de France vécut ensuite dans la paix et Henri, le huguenot, le roi du petit royaume de Navarre, devenu Henri IV Roi de France et de Navarre, publia le magnifique Edit de Nantes, fondement de l'unité nationale.
En ces temps troublés que nous vivons, au milieu de ce déferlement de brutalité sauvage exercée au nom des dieux, dans cette nuit profonde ou des fous voudrait nous ensevelir, son action est une lumière.
Gloire au roi Henri III, victime et vainqueur du fanatisme religieux !
Commentaires
On peut dire qu"'Heni" III fut le véritable
à corriger
On devrait se méfier des idées reçues. J'avoue que je n'avais pas de sympathie particulière pour ce monarque. J'avais tort. Ceci étant ; j'ai la (mauvaise) excuse de ne ps être un spécialiste de l'Histoire de France ... Florentin