Une nouvelle polémique, dont notre pays est friand, agite les esprits de nos responsables politiques; elle touche au rôle à assigner à l'histoire de France dans les études de nos bambins.
Notons pour commencer qu'il n'est pas indifférend d'appeler cette matière scolaire "Histoire de France" ou "Histoire de la France".
Dans le premier cas il y a une sorte d'incarnation du pays en une entité humaine unique, vivante et dotée d'une âme, dans l'autre une réduction de celui-ci à un pays comme les autres.
" Histoire de France" suppose un a priori laudatif et hagiographique; "Histoire de la France" est une formule neutre et descriptive.
On a vu ces derniers temps, dans le cadre des débordements de démagogie malheureusement inévitables en période électorale, encore aggravés par les meurtrières compétitions internes des primaires, un déferlement de prises de position péremptoires - surtout à droite, mais ausssi à gauche - sur la nécessité de revenir à une présentation enchantée de l'histoire de notre pays.
Il s'agirait d'en finir avec la repentance, la critique des erreurs et des crimes du passé pour focaliser l'attention sur ce qu'il y a de beau, de pur, de grand et d'universel dans les mille ans de notre histoire.
Focus sur Jeanne d'Arc, Saint-Louis, Louis XIV, Napoléon, de Gaulle. Bémol sur les guerres de religion, l'esclavage, les crimes de la Révolution et le régime de Vichy.
Cette querelle est absurde et tristement primaire.
La France, comme tous les pays du monde, a connu dans son passé lointain et récent des épisodes glorieux, des combats légitimes; elle a entraîné le monde à sa suite dans des idées dont elle a à s'enorgueillir.
Mais il faut être d'une singulière mauvaise foi pour ne pas admettre qu'elle s'est à de multiples reprises laissée aller à des fautes ou des crimes qui, pour blesser notre amour pour elle, n'en sont pas moins bien réels, et que ces héros de l'histoire sont des hommes et des femmes comme les autres, avec leurs grandeurs et leurs misères.
Souhaite-t--on apprendre à notre jeunesse l'Histoire ou un catéchisme nationaliste ?
L'Education Nationale doit avoir suffisamment confiance en la force de ses valeurs pour dire toute la vérité. Notre pays a certes commis des fautes dans son passé, et il convient de les étudier comme le reste, sans essayer ni de les grossir - comme c'est parfois le cas - ni de les minimiser.
Il faut décidément avoir bien peu de confiance en l'amour qu'il peut susciter pour craindre que ses fautes détournent de lui nos jeunes concitoyens.
Laissons le récit embelli et mythique aux vendeurs de rêve, et étudions notre histoire avec confiance.
N'oublions pas non plus, comme c'est hélas trop souvent le cas, que cette histoire nationale est une petite partie de la grande histoire du monde dont la France, plus que bien d'autres pays, est absolument indissociable.
Est-il nécessaire que nos parents soient des saints et qu'ils soient seuls au monde pour que nous les respections et les aimions ?
Commentaires
Il est effectivement indispensable que les enfants sachent tout de notre Histoire.
Mais cela présuppose que les enseignants fassent comprendre aux élèves ce qu'est le discernement et le sens de la nuance - sans quoi tout sera encore dénaturé et chacun fera de l'Histoire de France sa petite histoire.
Hélas, je ne crois pas qu'aujourd'hui les enseignants s'investissent autant dans leur mission pour aller jusque là...
Tout à fait d'accord avec vous! (c'est rare, mais ça arrive!!!)
léa