Depuis plus d'un demi-siècle les petits écrans voient se succéder speakers, présentateurs et journalistes, sortes de vedettes familières reçues chaque jour dans les foyers français, dont les visages et les voix sont associés aux évènements de nos vies.
Léon ZITRONE, Roger GICQUEL, Yves MOUROUSI, Marie-Laure AUGRY, Philippe GILDAS, Daniel BILALIAN, Jean-Pierre ELKABBACH, Bernard RAPP, Henri SANNIER, Hervé CLAUDE, Paul AMAR, Jean-Claude NARCY, Claude SERILLON, Bruno MASURE, Patrick POIVRE D'ARVOR, Claire CHAZAL, Françoise LABORDE, Samuel ETIENNE, Audrey PULVAR, Thomas SOTTO, Louis LAFORGE, Carole GAESSLER, Catherine MATAUSCH, Memona HINTERMAN-AFFEGEE, Laurent BIGNOLAS, Jean-Claude BOURRET, Christine OCKRENT, Gérard HOLZ, Thomas HUGHES, Harry ROSELMACK, Julien ARNAUD, Béatrice SCHÖNBERG, Laurence FERRARI, Jean-Pierre PERNAUT, Laurent DELAHOUSSE, Marie DRUCKER, Lise LUCET, Anne-Claire COUDRAY, Jacques LEGROS...
Même presqu'oubliés pour certains, leurs noms réveillent encore des évènements, des tranches de vie collective et privée.
Peu à peu du simple présentateur impartial lisant le texte du journal, on est passé au journaliste dont la personnalité s'impose puis, dernier avatar et sans doute le moins positif, au "présentateur vedette" qui transforme le journal télévisé en un show souvent futile et irritant.
J'ai dressé une liste des journalistes de TF1, de France2 et de FR3.
Depuis l'apparition des chaînes d'information en continu, il faudrait y ajouter les Ruth ELKRIEFF, Yves CALVI, Jean-Michel APATHIE, Jean-Jacques BOURDIN et tant d'autres qui surgissent chaque jour chez nous.
Je voudrais m'arrêter sur ce dernier dont le style et les coups d'éclat me semblent particulièrement emblématiques de l'époque que nous vivons.
Jean-Jacques BOURDIN anime la radio RMC tous les matins ainsi que la chaîne de télévision de la TNT BFMTV. Il est pugnace et campe le rôle du journaliste exigeant, ne faisant aucun cadeau à ceux qu'il interroge, près des auditeurs et des "gens".
On lui doit quelques moments forts de radio et de télévision, comme celui, entre autres, où il réduisit Myriam EL KOMRI a bafouiller et à admettre son ignorance sur un sujet touchant à son ministère. Régulièrement il s'amuse au jeu de la question qui tue; hier encore, il essayait de faire réciter à Emmanuel MACRON sa table de multiplication.
Cette conception d'un journalisme faisant montre d'agressivité et d'intransigeance, entre l'information et le divertissement, lui vaut une audience flatteuse. Mais elle révèle aussi une dérive plus qu'inquiétante.
Monsieur BOURDIN joue les vedettes : son émission matinale du BFM s'appelle en toute modestie " BOURDIN DIRECT", avec ce subtil jeu de mots sur "direct" dans son sens à la fois télévisuel, moral et pugilistique.
Son nom s'étale en grosses lettres dans le dos de l'invité, réduisant celui-ci à jouer les seconds rôles sur le théâtre Monsieur BOURDIN, la puissance invitante.
Et lui de brutaliser son interlocuteur, de faire la grosse voix, de fixer son vis à vis d'un regard sévère pour bien faire sentir qu'il a le souci de l'information et du public "qui a le droit de savoir".
Le comble du culot est atteint dans une série d'interviews qui dure depuis quelques jours où il a entrepris d'interroger les onze candidats à l'élection présidentielle. En soi, rien d'anormal dans ce projet. Mais l'intituler "entretien d'embauche", témoigne d'une insupportable vision des choses.
Ainsi Monsieur BOURDIN, au nom du peuple dont il se fait le porte-parole et qui dimanche prochain et dans deux semaines va "embaucher" un(e) président(e), ose jouer le rôle d'un directeur des ressources humaines ou d'un patron en s'autoproclamant son porte-parole.
Il y a à une dérive de l'information, du journalisme et de la démocratie tout à fait insupportable
Et ces femmes, ces hommes qui postulent à la magistrature suprême acceptent, à l'exception d'un seul, cette humiliation !
François FILLON a eu plus que raison de refuser de passer sous les fourches caudines de Monsieur BOURDIN et de se prêter à ses bourdineries.
Le 20 avril :
JJ. Bourdin dans son "entretien d'embauche" de ce matin recevait Jean-Luc Mélenchon. Ses questions insidieuses et orientées sur le Vénézuela ont fait sortir le candidat de ses gonds et lui ont inspiré de vigoureuses réponses qui ont eu le mérite de rabaisser quelque peu le caquet du monsieur. Réjouissant.
Commentaires
Nicolaï Vavilov
Je viens d'écouter l'émission de France Culture en question.
En effet, il semble que je sois sur la même longueur d'onde, comme on dit, qu'Alain Finkelkraut, au détail près.
Il stigmatise à juste titre la "vulgarité" de Bourdin et son incroyable irrespect; jusqu'à l'épisode de Mourousi s'asseyant, il y a trente ans sur le bureau de Mitterrand, indice de la prise de pouvoir par les médias, que j'avais envisagé d'évoquer dans mon billet...
Cette convergence n'est pas, je crois, le fruit du hasard : c'est que la formation intellectuelle, les passions de lecture, le regard sur le monde, lorsqu'ils sont en harmonie, conduisent à des visions qui ne peuvent que correspondre entre elles
Vous me donnez l'idée d'ajouter France Culture aux liens de ce blog. Merci.
probable synchronicté jungienne !!!
"invité des matins de France culture" 7h40 première partie 2 ème partie 8h20 le 18 avril
https://www.franceculture.fr/programmes/2017-04-18
Finkie tance Bourdin
@ Nicolaï Vavilov
J'essaie en vain d'ouvrir les liens que vous nous suggérez. Il doit manquer quelque chose dans l'adresse. Pourriez-vous vérifier ?
J'en profite pour vous dire que, comme d'habitude, je ne me suis inspiré de la pensée de personne avant de rédiger ce billet, comme tous les autres. Je vais aux sources des faits, non des opinions.
Merci pour votre fidélité.
cher Maître,
auriez-vous trouvé le votre?
convergence? inspiration ?
ici Bernard R vexillologue, érudit loco-régional, censeur, le qualifie "d'infâme"
https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins/dernieres-reflexions-avant-le-vote-avec-alain-finkielkraut
https://www.franceculture.fr/emissions /linvite-des-matins-2eme-partie/dernieres-reflexions-avant-le-vote-avec-alain-finkielkraut
Bourdin avait reçu Finkie lors de sa prise d'habit... habituellement le saltimbanque coupe la parole sans arrêt, Finkielkraut est à ma connaissance le seul à avoir pu s'exprimer sans interruption ni invective...
il faut écouter également Miller "Premier" le 21 avril "les matins de France Cul" stupéfiant...
Bourdin n'a semble-t-il pas fait allusion à la prestation de Finkielkraut ...
Vous avez bien dit:
"Au nom du peuple.."
"Magistrature suprême. . "
Dans les faits, ces gens là "rendent la justice"; ils se sentent investis d un pouvoir de Justice, d une mission de Justice.
Il s agit bel et bien du "tribunal médiatique" - réelle dérive.