Muriel Penicaud n'a pas toujours été ministre du travail. Elle a surtout, jusqu'à présent, géré avec soin ses propres affaires.
Sans remonter bien loin dans sa carrière de femme d'affaires, force est de constater que celle qui a en charge depuis deux mois le ministère du Travail et qui, à ce titre, va devoir faire accepter aux syndicats et aux salariés la restructuration du code du travail, a été d'une extrême sagacité dans la gestion de ses intérêts privés.
Lorsque j'étais élu dans l'Yonne, je me souviens de l'agacement amusé du maire de Sens, Etienne Braun, le jour où sa toute nouvelle adjointe aux affaires sociales, femme enrichie dans l'analyse du sang et des urines de ses concitoyens sénonais, avait revêtu un manteau de Zibeline hors de prix pour se rendre à sa permanence et recevoir entre autres, les demandeurs d'emploi de la commune.
Madame Penicaud, mutatis mutandis, est la réplique de cette élue évaporée.
Quelques chiffres suffiront sans doute à faire comprendre dans quel monde elle vit.
- En 2014, en plus de ses revenus, cette dame qui siège dans de nombreux conseils d'administration de grandes entreprises, a empoché la coquette somme de 93.000 euros en tant que présidente de l'Agence Française des Investissements Internationaux.
- Entre 2015 et 2017, elle a perçu 320.000 euros comme directrice générale de Business France.
C'est à ce titre, d'ailleurs, qu'elle a organisé (pour 380.000 euros) sans appel d'offres, le voyage à Las Vegas d'Emmanuel Macron, parti aux USA lever des fonds pour sa campagne, ce qui lui vaut quelques ennuis.
Mais la plus juteuse opération - et la plus contestable aussi - est celle qu'elle réalisa en 2013.
Elle était alors directrice des ressources humaines de Danone. Un plan de restructuration de cette énorme entreprise devait cette année-là entraîner le départ de 900 employés dont 230 pour la seule France. La bonne Madame Penicaud à qui, au vu de sa bonne tête de ménagère, on donnerait son portefeuille à garder sans aucune crainte, sentit que c'était pour elle le moment de réaliser une très grosse plus-value sur les stock-options qu'elle détenait.
Sans hésiter elle les vendit, empochant un bénéfice de 1,3 millions d'euros.
Ce pactole s'ajoutait à ses gains qui se montaient à 4,7 millions pour les trois années précédentes. 6 millions en quatre ans, soit l'équivalent de plus de 100 smics par mois !
Pour les citoyens que nous sommes, ces chiffres sont quasi irréels. Pour Madame Penicaud et ses semblables, ils sont le pain quotidien.
Et cette dame dont la fortune, si elle n'est pas trop dépensière, doit se hisser à des hauteurs vertigineuses, telle les prélats du XVIe siècle qui, gorgés de biens, expliquaient aux pauvres pourquoi ils devaient le rester pour gagner le paradis, va devoir expliquer aux salariés la nécessité de consentir des sacrifices pour le bien de l'économie française.
Il y a encore bien du travail pour passer de "l'ancien monde" au nouveau.
Bon courage à tous !
Commentaires
@ Florentin
Double catapultage, avec cette affaire : elle tombe au plus mal au moment où l'on parle de "moralisation" de la vie publique et où Mme Pelicaud reçoit les représentants de personnels qui perçoivent à peine le centième des profits de la ministre.
Certes, Mme Pelicaud ne manque pas de faire remarquer qu'elle n'a rien commis d'illégal. Rien d'illégal, sans doute, mais amoral, sûrement, puisque c'est par sa position de DRH de Danone qu'elle a pu profiter du plan social pour s'enrichir scandaleusement en vendant ses actions à la hausse ( car, "horreur économique", les licenciements font monter les actions).
Ce n'est pas parce qu'on ne joue pas dans la même cour qu'on n'a pas la droit de râler ! Il y a là quelques chose de scandaleux qui ne peut que nous hérisser le poil ...